Retour sur les 6e Assises du CIPAC

Pour un dialogue paritaire dans les arts visuels

17 novembre 2025

Les 6 Assises du CIPAC ont réuni, le 17 novembre, près de 200 participantes et participants ainsi qu’une vingtaine d’intervenantes et intervenants, confirmant l’importance accordée par le secteur des arts visuels à une question devenue centrale : l’émergence d’un dialogue paritaire.

Si le sujet est parfois perçu comme technique ou complexe, la mobilisation observée démontre qu’il constitue désormais un enjeu majeur pour l’avenir des métiers, des structures et de la gouvernance du secteur des arts visuels.

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Un enjeu stratégique pour la structuration du secteur

Les conditions d’emploi relèvent, certes, des salariés, mais elles engagent tout autant les instances de gouvernances qui assument la responsabilité d’employeur. Le sujet touche aussi les artistes, soit en tant qu’eux-mêmes employeurs, soit en tant que partenaires des salariés du secteur. La journée a ainsi mis en évidence que la relation professionnelle entre artistes et structures constitue l’un des fondements du fonctionnement du secteur et que cette relation doit faire l’objet de l’attention de tous les professionnels.

Dans un contexte national marqué par l’instabilité parlementaire, puis gouvernementale, les discussions avec le public ont démontré l’urgence de développer des espaces de négociation autonomes, permanents et indépendants de l’État. Alors que le secteur dispose de lieux de dialogue public et de dialogue social (tel que le CNPAV, ou comme en témoigne l'ouverture du COREPS Hauts-de-France aux arts visuels), il reste privé d’un dialogue paritaire propre, c’est-à-dire d’un espace où salariés et employeurs déterminent ensemble les conditions de travail et les cadres conventionnels qui les régissent.

Une matinée consacrée au cadre et à l’histoire du dialogue paritaire

La plénière animée par Arnaud Mias a permis de resituer les enjeux du dialogue paritaire dans une perspective historique et comparative, mettant en évidence son rôle déterminant dans la structuration de branches de métiers. Le temps de questions réponses avec le public a permis d’identifier que la construction de ce dialogue paritaire constitue désormais un enjeu de souveraineté professionnelle pour les arts visuels.

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La conférence performée de Robyn Chien, « Unionise your life ! », est venue rappeler l’importance de l’engagement personnel au travers du syndicalisme à tous les endroits des conditions de travail dans les arts visuels.

Deux tables rondes pour comprendre et comparer les cadres existants

1. L’état des lieux des conventions collectives dans la création artistique

Autour de Jack Aubert (AFDAS), les représentants des branches du spectacle vivant, de la musique, des arts de la rue, de l’audiovisuel et de l’édition ont partagé leur expérience du dialogue paritaire et analysé les dynamiques actuelles, notamment au regard de la politique nationale de réduction des conventions collectives.

Cette mise en perspective a permis d’identifier les pistes de rapprochement possibles et les conditions d’une future structuration des arts visuels en branche professionnelle. L’expérience de ces autres domaines de la création artistique amène autant d’exemples à étudier pour éclairer les choix de structuration des professions des arts visuels et identifier les dynamiques de discussions communes, indépendamment de la diversité de statuts des structures évoquée.

2. Les pratiques du dialogue paritaire dans l’Économie sociale et solidaire

Modérée par Michel Abhervé, cette table ronde a éclairé le fonctionnement mature du dialogue paritaire au sein de l’ESS, où les négociations collectives sont structurées par des objectifs explicites de progrès social.

Les échanges ont mis en lumière les difficultés des structures d’arts visuels à être représentées par les syndicats employeurs des branches existantes, et la nécessité de doter le secteur d’un outil qui lui soit spécifique. Les discussions ont montré aussi qu’il fallait dépasser les difficultés et incompréhensions pour instruire un dialogue qui conduise à l’amélioration collective des conditions de travail, tout en respectant les économies et particularités du secteur.

Un atelier participatif tourné vers l’avenir

L’atelier animé par Zoé Haller et Frédéric Rey a constitué un temps de projection collectif sur l'évolution des métiers des arts visuels. En croisant les regards de réseaux professionnels, de travailleuses et de travailleurs, il a permis de dégager des pistes pratiques pour accompagner l’évolution des métiers, des statuts et des conditions d’emploi, au regard des instruments potentiels de la négociation collective.

Des rapprochements avec des syndicats de l’intermittence ont pu être évoqués, tout comme le recours à une structuration par la coopérative pour porter des salariés intérimaires. L’atelier a également rappelé les conditions de précarité des artistes-autrices et artistes-auteurs et les métiers multiformes très présents dans le secteur des arts visuels.

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Clôture – Une trajectoire claire : construire le dialogue paritaire

Il y a deux ans, le CIPAC mettait en place un groupe de travail dont la création était souhaitée par l’assemblée générale de ses membres. Ce groupe de travail intitulé « GT Syndicat » a fait le premier constat de rappeler que le CIPAC est un syndicat ou organisme professionnel : il défend les structures et professionnels des arts visuels et plus largement défend la place de l’art contemporain en France. Pour autant, le CIPAC n’est pas un syndicat employeur et ne peut agir en lieu et place des syndicats employeurs, c’est-à-dire dans les enceintes de négociation des conventions collectives.

Ce groupe de travail syndicat faisait donc le constat que, si le secteur souhaite participer aux négociations collectives pour faire valoir les spécificités des conditions de travail dans les arts visuels, cela lui est interdit :

cela lui est interdit tant qu’il n’existe pas de syndicat employeur dans les arts visuels.

Le groupe a donc recommandé la création d’un syndicat employeur et cette recommandation a été reprise en assemblée générale du CIPAC, qui a voté à l’unanimité le fait de porter la création d’un syndicat employeur dans les arts visuels (SEDAV). Ainsi, certains membres du CIPAC ont financé l’étude juridique préfigurant la création de ce SEDAV.

Depuis, le groupe s’est ouvert à d’autres que les membres du CIPAC et a fait circuler un questionnaire de documentation à l’ensemble des structures des arts visuels. Ce questionnaire a été la première étape pour sensibiliser le secteur à l’absence de dialogue paritaire dans les arts visuels.

La seconde étape est cette journée des 6e Assises du CIPAC, dédiées au dialogue paritaire dans les arts visuels.

La conclusion de cette journée est évidente : il faut créer le dialogue paritaire dans les arts visuels ; il faut donc créer un syndicat employeur. Cette création se fera à l’initiative des structures volontaires, dans un cadre autonome et indépendant du CIPAC. Plusieurs réseaux, dont la FRAAP, ont d’ores et déjà annoncé leur engagement.

En parallèle, la construction d’un dialogue paritaire suppose l’implication des salariés. Les cinq centrales syndicales reconnues représentatives au CNPAV n’ont, à ce jour, désigné aucun représentant pour les arts visuels : cinq sièges restent vacants dans le dialogue public, et l’ensemble du dialogue paritaire reste à structurer.

Les 6ᵉ assises du CIPAC ont donc permis de formuler clairement un objectif stratégique pour le secteur des arts visuels :
- Assurer son autonomie professionnelle en construisant un véritable dialogue paritaire.
- Créer un syndicat employeur propre aux arts visuels.
- Mobiliser salariés pour investir les espaces de représentation encore vacants.

À l’heure où l’avenir des conditions de travail dépend de la capacité du secteur à se structurer en toute indépendance, l’appel de Robyn Chien résonne comme une orientation collective : salariés, employeurs, « Unionise your life ! »


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Pour consulter le programme proposé le 17 novembre 2025